En vérité, Alice
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Tiffany Tavernier

L'emprise

J’ai lu d’une traite En vérité, Alice, un excellent roman.

C’est l’histoire d’Alice qui est sous l’emprise d’un homme violent, autant physiquement que psychologiquement. Celle-ci va trouver un emploi à Paris dans un monde qu’elle ne connaît pas, en travaillant pour un évêque. Peu à peu, elle va s’enfoncer dans un cercle infernal, incapable de sortir de cette relation toxique.

En vérité, Alice - Tiffany Tavernier

L'avis de Charlotte

La construction du roman est soignée et le style maîtrisé. Le seul petit défaut selon moi est le manque de finesse par moment. En effet, la perversité de l’homme est telle qu’on a un peu de mal à croire comment l’héroïne reste aveuglée, il aurait fallu y ajouter un peu plus de chaleur car c’est bien là la force de ces manipulateurs, d’ajouter une caresse sitôt la gifle faite pour embrouiller un peu plus l’esprit de sa victime. Le récit est traversé de passages dans lesquels le lecteur se retrouve plongé dans la tête d’Alice. C’est là que l’on prend conscience de l’emprise. Elle se remet en doute, se dévalorise et culpabilise alors que le comportement de son conjoint est absolument inadmissible.
La construction du roman est soignée et le style maîtrisé. Le seul petit défaut selon moi est le manque de finesse par moment. En effet, la perversité de l’homme est telle qu’on a un peu de mal à croire comment l’héroïne reste aveuglée, il aurait fallu y ajouter un peu plus de chaleur car c’est bien là la force de ces manipulateurs, d’ajouter une caresse sitôt la gifle faite pour embrouiller un peu plus l’esprit de sa victime. Le récit est traversé de passages dans lesquels le lecteur se retrouve plongé dans la tête d’Alice. C’est là que l’on prend conscience de l’emprise. Elle se remet en doute, se dévalorise et culpabilise alors que le comportement de son conjoint est absolument inadmissible.

Extrait d’un monologue p. 37. On comprend ici la force de la manipulation qui pousse cette jeune femme à se trouver détestable (mais est-ce bien sa propre pensée ?) :
« Qu’est-ce qui m’a pris, aussi, de lui parler à cette vitesse, cette vitesse qu’il exècre avec ce trop-plein d’excitation dans la voix, lui qui supporte si mal quand je me mets à parler fort, de tout lui déballer sans même lui laisser le temps de s’asseoir, de ne même pas avoir cherché à prendre en compte son niveau d’épuisement, de stress, lui qui, depuis le premier jour, pour me permettre de vivre sereine, se coltine toute la pression ! Et lorsque, sur son visage, j’ai vu poindre son énervement, de ne pas m’être arrêtée net, ne serait-ce que pour le laisser souffler, mais non, il a fallu que je prenne toute la place, moi et ma « petite joie » du moment, alors que lui, harassé par sa journée de travail… seulement non, ma « petite personne » en avait décidé autrement et, emportée par mon « narcissisme », j’ai continué sur le même débit à lui dire combien j’étais heureuse, combien ça y est, grâce à ce nouveau job, il n’avait plus de souci d’argent à se faire, moi, le « centre du monde », moi, la soudaine « mère Teresa de notre couple », moi, mon « exaltation grotesque », celle d’avoir enfin trouvé un travail, comme si, depuis des années, il ne s’échinait pas, lui. Il ne se sacrifiait pas. Sans tenir compte, un seul instant, de la naissance de ce pli sur son front, ce pli d’exaspération, qu’est-ce qui m’a pris, bon sang, lui qui n’aime rien tant que le silence, mon silence, mes caresses aussi, qu’est-ce qui m’a pris, oui, d’avoir ainsi bondi sur lui sans m’être, préalablement, assurée que tout s’était bien passé pour lui, comme si j’étais la seule ici, comme s’il n’était là que pour m’écouter, pour m’applaudir.

Dans la même lignée de romans, on peut citer L’amour et les forêts de Eric Reinhardt (Gallimard, 2014).
Mais ce n’est pas « juste » une histoire sur la violence conjugale. C’est une histoire sur la résilience, sur le chemin intérieur pour retrouver la lumière, la force de sortir d’une mauvaise situation. Je recommande ce beau roman de littérature française, si bien écrit.

 

8/10

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